Maison, dite Garage Vauthier

France > Nouvelle-Aquitaine > Gironde > Saint-Émilion

Implanté dans l'îlot situé entre la rue de l'Abbé Bergey à l’est et la portion nord-ouest de l'enceinte, ce site est l’un des plus vastes et des plus complexes de la ville. Il s'agit d'un ensemble d'au moins trois unités distinctes qui ont connu, entre le 12e et le 16e siècle, un grand nombre de transformations, souvent liées à des mutations de propriétés.

Le noyau de cet ensemble bâti, appelé le "Garage Vauthier" du nom de ses anciens propriétaires, est constitué aujourd'hui par un bâtiment (unité 1) dont la commune est propriétaire et qui sert de remise. Il renferme les vestiges d’une maison romane qui s’étendait plus au sud sur l’emprise de l’actuelle parcelle cadastrale 383 et qui, dans un second temps, communiqua également au nord avec une vaste bâtiment qui occupait alors la parcelle 381 (unité 2). Dans le courant du 14e siècle, la maison est reconstruite en deux étapes. Isolée de sa voisine située au nord, elle reste en revanche en lien avec le bâtiment sud aujourd’hui disparu. À la fin du Moyen-Âge, une grande campagne de rénovation est réalisée. Le pignon sur rue est mis au goût du jour avec l’installation d’une grande croisée en lieu et place des anciennes fenêtres, le plancher du comble est remanié et une nouvelle charpente est installée ; celle-ci a pu être datée par dendrochronologie des années 1467-1468. C'est probablement lors de cette même phase que la maison est agrandie vers l’ouest (unité 3) sur l’emprise de ce qui devait être jusque-là une cour appartenant à la maison située au nord. Cette dernière est abandonnée dès cette période puisqu’une fenêtre de la nouvelle extension prend le jour du côté nord du mur. Ces travaux semblent ne pas avoir été achevés, comme le suggère l’absence d’enduit de régularisation tant sur le pignon que sur les murs de la grande salle de l’étage, où les bouchages des baies précédentes sont restés apparents - ce qui semble peu cohérent avec le décor d’une grande salle d’apparat. Quoi qu’il en soit, à partir du 18e siècle au plus tard, lors de l’installation de la petite fenêtre dans l’emprise de l’ancienne grande croisée du pignon oriental, le bâtiment n’a guère plus qu’une fonction de remise. Le bâtiment paraît avoir été endommagé par un incendie à la fin du 18e siècle, comme en témoigne une reprise de la partie orientale de la charpente à cette époque.

Périodes

Secondaire : 12e siècle

Secondaire : limite 12e siècle 13e siècle

Principale : 14e siècle

Principale : 2e moitié 15e siècle

Secondaire : 18e siècle

De ce vaste ensemble, L’unité 1 est aujourd’hui la plus complète. Elle présente un plan barlong et trapézoïdal, de 5 à 7 m de large sur 12 m de long environ, et a compté jusqu'à trois niveaux (l’étage et l’ancien comble sont aujourd’hui réunis). Depuis la rue, seul est visible son pignon oriental dont la construction remonte au 14e siècle. Celui-ci, construit en pierres de taille, a été éventré au niveau du rez-de-chaussée par une large porte de garage bétonnée qui ne laisse guère plus apparaître que le couvrement en arc en brisé d’une porte, haute et étroite, qui devait constituer l’entrée principale de la demeure. L’étage présente les vestiges de trois générations de fenêtres imbriquées les unes dans les autres. L’actuelle baie couverte d’un arc segmentaire a été insérée au 18e siècle dans le bouchage d’une grande croisée, à l’encadrement orné de baguettes croisées, dont la mise en place date de la seconde moitié du 15e siècle. Celle-ci est elle-même venue remplacer les deux fenêtres d’origine dont ne subsistent que les extrémités et le départ de leur cordon d’appui. Ces baies couvertes d’un linteau droit présentaient un encadrement chanfreiné. Elles étaient protégées des intempéries et du soleil par un auvent qui était fixé aux deux corbeaux conservés de part et d’autre des fenêtres.

Derrière cette façade, la maison renferme deux grandes pièces. Les murs du rez-de-chaussée présentent de larges joints cimentés sous lesquels on peine à discerner les maçonneries médiévales. C’est particulièrement le cas des assises régulières de grand appareil roman du mur sud dont les joints fins disparaissent sous cette "rénovation" grossière. Ce mur comporte trois armoires murales couvertes en plein cintre et une étroite porte, également couverte en plein cintre. Celle-ci, actuellement murée, indique que lors de la phase primitive, le mur était un refend et que le bâtiment se développait alors vers le sud.

L’étage est occupé par ce qui devait être à l’origine une grande salle d’apparat. Outre les fenêtres du pignon oriental décrites précédemment, dont on retrouve ici l’enchevêtrement de leurs embrasures successives, l’éclairement de ce niveau était complété initialement par une modeste baie située dans le pignon opposé, sur le côté de la grande cheminée qui occupe une bonne partie de ce mur. Couverte d’un arc segmentaire à l’encadrement chanfreiné, cette cheminée est intégrée dans la maçonnerie et son coffre forme une saillie de l’autre côté du mur qui, à l’origine, donnait sur l’extérieur. Dans l’angle nord-ouest, la porte actuellement murée avec de la brique avait été percée lors de l’extension de la maison vers l’ouest ; l’extrémité du gouttereau nord a été retaillée pour faciliter l’ouverture de l’huis. Ce mur nord, plaqué contre la façade sud de l’unité 2, était initialement dépourvu de tout aménagement à l’exception d’une petite niche carrée implantée près de l’extrémité occidentale. Les deux embrasures murées avec des parpaings sont celle d'une fenêtre et d'une porte, aménagées après-coup. La porte fut tout d’abord percée pour recréer une communication avec l’unité 2. Lors de la disparition de cette dernière, la porte fut alors réduite en une étroite fente de jour toujours visible au revers du mur. C’est peut-être à cette même occasion que la fenêtre voisine fut percée à son tour puisque son encadrement chanfreiné prend place sur l’emprise d’un ancien mur de refend de l’unité 2. Enfin, à la jonction avec le pignon oriental, ce gouttereau conserve le bouchage d’une grande niche d’évier couverte en anse de panier qui avait été aménagée lors des travaux de la seconde moitié du 15e siècle. Le gouttereau sud, en position de refend lors de sa reconstruction au 14e siècle, est percé de quatre portes jumelées, actuellement murées, qui communiquaient initialement avec les espaces qui se développaient alors vers le sud. Parmi ces portes, la deuxième en partant de l’ouest a été ajoutée dans un second temps mais son encadrement a bénéficié comme ceux des autres portes de l’enduit de régularisation appliqué sur l’ensemble des murs de cette salle dans le courant du 14e siècle ; son percement est donc intervenu assez peu de temps après la reconstruction du mur. Cet enduit recouvert d’un badigeon de chaux est un bon marqueur chronologique puisqu’il a été entaillé par les différentes reprises du 15e siècle et n’a pas été régularisé par la suite. De ce fait, les différentes évolutions du plafond de la salle ainsi que l’emprise de l’ancien niveau de comble sont encore parfaitement visibles ; trois états successifs ont ainsi pu être identifiés entre le 14e et le 15e siècle. La charpente, qui présente une pente relativement faible de 28°, est de type à fermes et pannes.

L'unité 2 n'est plus connue que par son mur sud, accolé à l'unité 1 et formant le côté nord de l’unité 3. Ses assises romanes en pierre de taille de grand appareil se prolongent sur toute la largeur de l'îlot, de la rue jusqu'au fossé, soit 45 m (cette seconde unité devait occuper la majeure partie de l’actuelle grande parcelle cadastrale AP 381). Sur ses deux-tiers orientaux, ce mur sud conserve la totalité de son élévation, soit 8 m au-dessus du sol actuel. Les arrachements de deux refends d’axe nord-sud définissent trois espaces distincts.

La première partie, côté rue de l’Abbé Bergey, correspond au rez-de-chaussée d’une première maison romane (équipée d’une armoire murale couverte d’un arc en plein-cintre) sur lequel est venu s’appuyer le reste du mur bâti vers 1200. Au-dessus de ce rez-de-chaussée, ce nouveau mur présente lui-aussi une grande armoire murale (implantée très haut par rapport à l’ancien plancher) ainsi qu’une grande porte couverte en plein cintre qui communiquait avec l’étage de l’unité 1. Cette porte fut par la suite réduite en une version couverte avec un linteau droit, probablement lors des travaux de la fin du 15e siècle, puis bouchée pour laisser place à une étroite fenêtre après la démolition de cette portion de l’unité 2.

La partie centrale de cette unité 2 est délimitée par les deux murs de refends espacés de 17 m. Le rez-de-chaussée de cet espace semblait n’avoir à l’origine qu’une grande porte, couverte en plein-cintre, qui ouvrait sur une venelle venant de la place de la Collégiale (actuelle place Pioceau). Au regard de cette porte partiellement enterrée, le niveau de sol d’origine doit se situer environ 1 m en-dessous du niveau actuel. Une imposante porte cochère, couverte d’un arc segmentaire, fut ouverte par la suite, peut-être en lieu et place d’une plus ancienne, pour communiquer avec la cour sur laquelle s’est installée plus tard l’unité 3. L’étage accueillait à l’origine une grande salle d’apparat accessible par deux portes jumelles, dont on voit ici l’arrière-voussure, qui donnaient sur la cour où devait prendre place un escalier. Cette grande salle était couverte par une charpente apparente dont les fermes principales étaient soutenues par des aisseliers reposant sur quatre corbeaux sculptés. Lors de la construction de l’unité 3 sur l’emprise de la cour, les deux portes d’accès à la grande salle furent murées et une fenêtre aménagée dans le bouchage de l’une d’elles ; signe que l’unité 2 avait été démolie préalablement. Le décor de l’appui mouluré de cette fenêtre permet de situer cette campagne de travaux durant le 16e siècle. C’est probablement à cette même occasion que furent percées dans le parement du rez-de-chaussée les deux grandes fentes de jours dotées de barres à barbelures. La grande porte cochère du rez-de-chaussée fut à son tour murée et une mince fente de jour prit place dans son bouchage.

Du dernier tiers de cette vaste unité 2, ne subsistent que trois assises qui font aujourd’hui office de muret de soutènement dans un jardin longeant le fossé. Au regard des quelques assises du mur d’enceinte conservées et délimitées aux extrémités de cette parcelle cadastrale par deux larges contreforts/tourelles, cette unité devait avoir une largeur d’environ 13 m ; ce qui représentait un ensemble bâti considérable, probablement l’un des plus importants de la ville au début du 13e siècle.

L'unité 3, qui communiquait par deux portes avec l’unité 1, est en fait une extension de cette dernière. Sa mise en place remonte à la fin du 15e siècle ou au siècle suivant. Elle s’insère sur l’emprise de ce qui semblait être resté jusque-là une cour à l'arrière de l'unité 1 (moitié occidentale de la parcelle AP 457). Cette cour était alors associée à l’unité 2 et était bordée à l’ouest par une venelle qui, venant de la place de la Collégiale (actuelle place Pioceau), donnait accès au rez-de-chaussée de cette vaste demeure. Les murs de l’unité 3, recouverts de ciment, ne laissent aujourd’hui apparaître aucun détail d’architecture ; seul l’encadrement d’une fenêtre visible depuis la parcelle AP 381 a permis de dater la mise en place de cette unité.

Murs
  1. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : pierre de taille

    Revêtement : enduit partiel

  2. Mise en oeuvre : moyen appareil

  3. Matériau du gros oeuvre : calcaire

    Mise en oeuvre : moellon

Toits
  1. tuile creuse
Étages

1 étage carré

Couvertures
  1. Forme de la couverture : toit à longs pans

    Partie de toit : pignon couvert

Localisation

Adresse: Nouvelle-Aquitaine , Gironde , Saint-Émilion , 2bis rue de l' Abbé-Bergey

Milieu d'implantation: en ville

Lieu-dit/quartier: Ville haute

Cadastre: 1845 C 286 (280 et 288 pour l’unité 2), 2010 AP 457 (381 pour l’unité 2)

Localiser ce document

Chargement des enrichissements...